Une salariée demande des dommages intérêts à son employeur pour non-respect de son obligation de sécurité en oubliant sa visite médicale.
Dans les faits, la salariée fait partie des effectifs depuis 10 ans. Dix années pendant lesquelles l’employeur n’a pas failli une seule fois à lui organiser sa visite médicale.
Peut-on lui reprocher son oubli ? A-t-il droit à des circonstances atténuantes au regard des faits ?
Avant de nous prononcer, faisons un petit rappel du cours d’ABL Formation sur la visite médicale.
La loi Travail du 8 aout 2016 a supprimé cet examen systématique, et la remplace par une simple visite d’information et de prévention (V.I.P) organisée après l’embauche et au plus tard dans un délai de trois mois, sauf pour les salariés travaillant de nuit et ceux âgés de moins de 18 ans, pour lesquels la visite doit avoir lieu avant l’embauche. (article L.4624-1 alinéa 1 C. du trav.).
Cette visite d’information et de prévention a notamment pour objet :
- d’interroger le salarié sur son état de santé ;
- de l'informer sur les risques éventuels auxquels l’expose son poste de travail ;
- de le sensibiliser sur les moyens de prévention à mettre en œuvre ;
- de s’assurer qu’il n'est pas atteint d'une affection dangereuse pour les autres travailleurs ;
- d’identifier si son état de santé ou les risques auxquels il est exposé nécessitent une orientation vers le médecin du travail ;
- de l’informer sur les modalités de suivi de son état de santé par le service et sur la possibilité dont il dispose, à tout moment, de bénéficier d’une visite à sa demande avec le médecin du travail.
N’étant pas un examen médical, cette visite pourra être assurée par un collaborateur médecin, un interne en médecine du travail ou un infirmier. Ce dernier pourra toutefois orienter le salarié vers le médecin du travail.
La visite devra être organisée individuellement pour chaque salarié.
Elle donnera lieu à l'établissement de son dossier médical en santé au travail et à la délivrance d'une attestation de suivi.
Le salarié sera toutefois dispensé de passer une visite, s’il en a déjà passé une sur le même poste dans les 5 années précédant l’embauche et s’il est en possession de la dernière attestation de suivi ou du dernier avis d'aptitude (c. trav. Art R. 4624-15).
Ensuite, au cours de sa relation de travail, le salarié aura droit à des visites périodiques « selon une périodicité qui ne peut excéder cinq ans. Ce délai, qui prend en compte les conditions de travail, l'âge et l'état de santé du salarié, ainsi que les risques auxquels il est exposé, est fixé par le médecin du travail » (C. trav. Art. R 4624-16)
Dans notre affaire, il s’agissait de l’oubli d’UNE seule visite périodique sur 10 ans de présence dans l’entreprise.
Doit-on considérer que l’employeur a failli à son devoir de sécurité alors que la salariée était suivie régulièrement tous les ans depuis 10 ans ?
OUI !
La Cour de cassation dans un arrêt 14 septembre 2022 N°21.10-608, a considéré que l’employeur avait violé son obligation de sécurité et a octroyé des dommages intérêts à la salariée. Le fait d’avoir accompli son devoir sans faille en 10 ans n’a absolument rien changé à la donne.
Avis aux GP et RH, vous qui êtes en pleine période de déclaration annuelle à la médecine du travail, faites le point sur vos salariés !